Elsevier

Chirurgie de la Main

Volume 23, Supplement 1, December 2004, Pages S15-S26
Chirurgie de la Main

Article original
Intérêt de l’IRM dans les syndromes canalaires du membre supérieurMagnetic resonance imaging of nerve entrapment syndromes of the upper limb

https://doi.org/10.1016/j.main.2004.10.008Get rights and content

Résumé

L’IRM n’est pas un examen de routine pour l’exploration des syndromes canalaires du membre supérieur. Néanmoins sa résolution en contraste unique ainsi que la possibilité d’explorer des défilés en situation profonde la réserve à des indications bien particulières. Une première excellente indication est l’exploration des syndromes du défilé cervicothoracique neurologique à la recherche d’un conflit avec une bandelette fibreuse. Les compressions vasculaires sont à réserver à des épreuves dynamiques par échodoppler et/ou TDM. Une deuxième bonne indication est la recherche d’une compression du nerf sus-scapulaire par un kyste paraglénoïdien postérieur. L’IRM peut mettre en évidence dans le même temps une fissure du labrum postérieur. L’IRM est également intéressante dans l’exploration des syndromes du canal carpien atypiques, comme les formes à l’effort, à la recherche d’une compression extrinsèque du nerf médian par une anomalie musculaire ou tendineuse, ou par un kyste synovial profond. En cas de récidive douloureuse d’un canal carpien opéré, l’IRM peut aider à différentier une libération insuffisante, une fibrose péri- ou endoneurale, une compression musculaire ou kystique du nerf non vue initialement. D’autres défilés peuvent être plus rarement explorés (épitrochléo-olécrânien, canal de Guyon, nerf interosseux postérieur, syndrome du pronateur, nerf interosseux antérieur). Il ne faut pas oublier la capacité de l’IRM à montrer en aval de la compression nerveuse les signes de dénervation musculaire avec sa topographie précise.

Abstract

MRI is not routinely used for investigation of nerve entrapment syndromes of the upper extremity. However, its unique contrast resolution and possibility to image deep locations make it an appropriate modality in specific situations. A first excellent indication is exploration of a nerve-related thoracic outlet syndrome searching for an impinging fibrous band. Vascular compressions should be explored by Doppler and/or CT with dynamic maneuvers. A second good indication is to demonstrate compression of the suprascapular nerve by a posterior paraglenoid cyst. MRI may show at the same time a posterior labral tear. MRI may also be useful in atypical carpal tunnel syndromes, such as effort-related syndromes, to demonstrate extrinsic compression of the median nerve by a muscular or tendinous abnormality, or by a deep-seated synovial cyst. In cases of painful post-operative course, MRI may help to differentiate insufficient release of the retinaculum from peri- or endoneural fibrosis or from a nerve compression by a muscular or cystic structure initially overlooked. Other nerve pathways may rarely be studied: medial epicondyle and olecranon region, Guyon’s canal, posterior or anterior interosseous nerve, pronator teres syndrome. Finally, MRI has the ability to show with great precision downstream signs of nerve compression, namely intramuscular signal abnormalities related to denervation.

Introduction

À la différence des affections neurologiques centrales, l’IRM a eu peu d’impact sur les atteintes nerveuses périphériques. Les nerfs périphériques sont de petite taille et de trajet complexe rendant l’approche par IRM difficile. Les nerfs sont proches de structures vasculaires dans des zones sensibles, comme le plexus brachial, pouvant gêner l’interprétation des images. La plupart des atteintes nerveuses périphériques ne s’accompagnent pas d’élargissement du nerf, privant l’IRM de ce signe important. Le diagnostic d’une compression nerveuse dans les défilés ostéofibreux du membre supérieur repose sur les données cliniques et électriques [1]. Néanmoins ces conflits sont maintenant accessibles directement à l’imagerie moderne avec les progrès récents de l’IRM (imagerie haute résolution avec les antennes en réseau phasé, IRM à très haut champ et bientôt imagerie de diffusion des nerfs périphériques) [2], [3], [4]. Les autres modalités d’imagerie ont également largement gagné en qualité, qu’il s’agisse de la tomodensitométrie (TDM) à multidétection avec les acquisitions volumiques ultrarapides ou de l’échographie avec les sondes hautes fréquences. Au membre supérieur, les compressions nerveuses le plus souvent explorées en IRM sont les syndromes du défilé cervicothoracique, le syndrome du canal carpien et du canal de Guyon [5]. Les examens clinique et électrique déterminent le niveau et la sévérité de la compression nerveuse mais n’apportent pas d’informations sur l’aspect du nerf et des tissus environnants, pouvant aider à en déterminer l’étiologie. La visualisation directe des anomalies nerveuses peut améliorer le diagnostic et les résultats chirurgicaux en donnant des informations sur la nature de l’agent compressif, particulièrement dans les cas où la clinique est confuse ou en contradiction avec les données électriques. L’imagerie haute résolution permet de visualiser directement les nerfs atteints avec une modification de forme, de structure et parfois de signal. La dénervation musculaire est également accessible au stade subaigu en IRM par la mise en évidence d’un œdème musculaire par des séquences adaptées avec suppression de la graisse [6]. Au stade chronique, l’amyotrophie avec infiltration graisseuse est accessible aussi bien en IRM qu’en TDM, plus difficile à évaluer en échographie. Une large gamme d’étiologies compressives est également accessible à l’IRM, comme les ténosynovites, les kystes synoviaux, les tumeurs des tissus mous, les anomalies osseuses et articulaires et les muscles surnuméraires.

Section snippets

Le défilé cervicothoracique

La traversée cervicothoracobrachiale comprend trois espaces anatomiques traversés par les structures vasculonerveuses destinées au membre supérieur : le triangle interscalénique, la pince costoclaviculaire et le tunnel du muscle petit pectoral (ou sous-coracoïdien). Le rétrécissement congénital ou acquis de l’un de ces tunnels peut donc être à l’origine d’une souffrance vasculaire ou nerveuse, notamment lors de manœuvres dynamiques. Il s’agit du syndrome de la traversée cervicothoracobrachiale.

Le syndrome de nerf suprascapulaire

Le nerf suprascapulaire pénètre dans la fosse sus-épineuse par l’échancrure coracoïdienne ou suprascapulaire. Cette échancrure est fermée par le ligament coracoïdien (ou ligament scapulaire transverse supérieur). Le nerf chemine ensuite en bas et en dehors, plaqué contre l’omoplate par le muscle supraépineux auquel il donne ses branches motrices. Il pénètre ensuite dans la fosse sous-épineuse, accompagné de l’artère sus-scapulaire en contournant le bord externe de l’épine de l’omoplate, par

Le syndrome du canal carpien

L’imagerie du canal carpien est inutile dans les formes primitives habituelles, mais elle peut être indiquée en cas de manifestations atypiques à la recherche d’une cause compressive autre qu’une ténosynovite, ou en cas de complication postopératoire [1]. En cas de canal carpien d’effort, il est recommandé de pratiquer l’IRM après épreuve d’effort [18]. De nombreuses causes de compression extrinsèque du nerf médian peuvent être reconnues en IRM [19], [20]. Il s’agit d’anomalies congénitales ou

Le défilé épitrochléo-olécrânien

Le nerf ulnaire, au cours de son passage au coude, chemine dans un canal ostéofibreux formé par l’olécrane, l’épitrochlée et le fascia d’Osborne. Le nerf s’engage dans le défilé entre les chefs musculaires ulnaire et huméral du flexor carpi ulnaris. Les insertions de ce muscle sont reliées par une arche aponévrotique, le ligament arqué, qui représente une expansion distale du fascia d’Osborne.

L’évaluation du nerf ulnaire nécessite une imagerie en haute résolution. L’exploration IRM est réalisée

Le canal de Guyon

Les limites et la forme du canal de Guyon varient en IRM de proximal en distal, mais sans différence significative de la section axiale du canal. Le nerf ulnaire est accessible à l’IRM au niveau du pisiforme comme une petite structure arrondie, en dedans de l’artère ulnaire [52]. Les deux branches de division du nerf sont visibles, la branche sensitive continue de cheminer le long de l’artère ulnaire, alors que la branche motrice se déplace plus en profondeur, le long de la face médiale de

Autres compressions nerveuses

L’exploration par IRM des autres compressions nerveuses du membre supérieur reste marginale. Il s’agit essentiellement des syndromes des nerfs interosseux postérieur et antérieur et du syndrome du pronateur. L’IRM est souvent décevante dans ces indications car les signes directs de compression nerveuse sont rarement mis en évidence en raison de la petite taille des structures impliquées. La mise en évidence de signes de dénervation musculaire authentifie le conflit mais n’apporte pas

Conclusion

L’IRM apparaît comme la modalité d’imagerie la plus complète des compressions nerveuses du membre supérieur. Elle reste cependant limitée pour une approche dynamique d’un conflit, à la différence de l’échographie. L’IRM révèle à la fois des anomalies morphologiques comme le renflement proximal du nerf en amont d’une compression mais aussi des anomalies de signal dues à l’œdème et à des troubles de perfusion du nerf. L’IRM permet également une approche étiologique très précise des compressions

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      Citation Excerpt :

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    • Current and future imaging of the peripheral nervous system

      2014, Diagnostic and Interventional Imaging
      Citation Excerpt :

      The techniques used to examine the peripheral nervous system, either using ultrasound or MRI, are now robust and have the clear advantage of being able to examine the perineural environment, which is not easily assessed by clinical examination alone or by electroneuromyography [76]. Whilst it is currently of limited use in the management of polyneuropathies, imaging is a useful diagnostic complement in focal mononeuropathies [42], particularly in case of atypical nerve entrapment syndromes which do not appear to be idiopathic [11,43]. Alongside these established uses, the many developments, particularly in MRI, are opening new perspectives such as monitoring axonal regeneration and improving our understanding of peripheral nervous pathophysiology.

    • Thoracic outlet syndrome

      2011, Tunisie Medicale
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